Depuis hier, dimanche 8 août et pendant 24 heures, les plages de Biarritz ont été fermées à la baignade venant s’ajouter à celles de Bidart et Saint-Jean-de-Luz notamment. Comme si la récurrence de mauvais temps que connait le Pays Basque depuis ce début d’été ne suffisait pas, ce sont les sessions de surf et la baignade qui ont été mis en péril.
La cause ?
Une algue toxique pour l’homme qui se propage depuis plusieurs jours le long du littoral basque. Ce matin, une réunion s’est tenue entre les villes concernées, la communauté Pays Basque, les services de l’État et l’ARS (Agence régionale de santé). Une réunion qui, après le feu vert de l’ARS, a permis la réouverture des plages ce midi.
Arrivages d’algues toxiques sur la Côte Basque sud générant irritations et symptômes respiratoires chez plagistes, surfeurs et sauveteurs depuis plusieurs jours. Fermeture des plages de Biarritz par précaution. https://t.co/2mDj4F6W0i
— Dr Guillaume BARUCQ (@GuillaumeBarucq) August 8, 2021
Une bonne et une mauvaise nouvelle
Cette algue qui a soudainement envahi les plages du Pays Basque porte le nom de Ostréopsis siamensis, à ne pas confondre avec l’Ostréopsis ovata que l’on trouve généralement en Méditerranée. Un micro-organisme déjà observé en 2020 à Hendaye.
La bonne nouvelle, c’est qu’elle est moins toxique que cette dernière.
La mauvaise ? C’est qu’il y en aurait une quantité importante au large des plages basques… C’est ce que nous a permis d’apprendre ce matin l’ARS. D’après eux, les gens présentant des symptômes liés à cette algue se trouvent essentiellement sur les communes de Bidart, Saint-Jean-de-Luz et Biarritz. L’algue décelée sur le littoral doit désormais être étudiée par l’IFREMER à Arcachon,
Des symptômes franchement pas agréables qui ressemblent parfois à ceux du Covid
En plus de son odeur nauséabonde, cette algue n’est pas sans conséquences sur l’organisme et la santé humaine et les symptômes sont divers.
L’algue peut provoquer des réactions épidermiques, des troubles respiratoires et être à l’origine d’un état grippal. Il est fortement conseillé à ceux qui souffrent d’une sinusite, d’irritation oculaire, de fatigue ou de fièvre suite à une baignade de consulter. Autrement dit, si vous avez ressenti des symptômes inhabituels pendant ou après votre session de surf ne prenez pas la chose trop à la légère ! Même si les symptômes (normalement) diminuent et s’estompent dans les 48 heures, ils doivent cependant être surveillés.
Selon Guillaume Barucq, médecin et élu local de la ville de Biarritz, les symptômes peuvent varier en fonction des heures et de la marée, ce qui les rend hautement imprévisibles. Hier, via son compte Instagram Surf Prevention, le médecin biarrot a fait une compilation des symptômes que lui ont fait remonter de nombreuses personnes.
Ce médecin généraliste invite tout individu présentant des symptômes après la baignade ou la session à se signaler aux sauveteurs présents sur la plage et espère que des mesures seront prises localement.
Il conseille également à toute personne dont l’état s’aggraverait de contacter un médecin ou SOS médecin, tout en affirmant néanmoins que les cas ne sont généralement pas graves. Seul problème, les symptômes provoqués par l’Ostréopsis sont relativement similaires à ceux d’un cas de Covid léger… Oui, sinon ça serait trop simple !
Début de semaine compliqué à prévoir pour les médecins généralistes de la Côte Basque avec de nombreux syndromes respiratoires liés aux algues toxiques.
Spoiler : les symptômes peuvent mimer ceux d’un Covid… en plein dans la vague de cas que nous connaissons.
— Dr Guillaume BARUCQ (@GuillaumeBarucq) August 8, 2021
Guillaume Barucq invite donc à la plus grande prudence et demande à tout ceux qui auraient le moindre doute de prendre ses précautions et de se faire tester.
La faute au réchauffement climatique ?
Très probablement mais pas que.
Cette algue tropicale est microscopique. Elle se retrouve généralement dans l’eau lors d’épisodes fortement hydrodynamiques (de fortes pluies). Cette algue unicellulaire ne s’observe que dans les milieux côtiers peu profonds. L’Ostréopsis forme un film gélatineux marron sur la roche ou à la surface de l’eau et produit une pellicule brune et membraneuse reconnaissable. Depuis quelques années, elle est de plus en plus observée en Italie, en Espagne et en France. D’après les scientifiques, les changements climatiques à l’oeuvre entraînent des conditions propices à son développement. Le réchauffement des eaux et le transport maritime en sont certainement à l’origine.
Mais le réchauffement climatique serait-il le seul responsable ?
Ce fâcheux épisode que traverse actuellement la côte basque est peut être l’occasion d’évoquer le problème récurent de la contamination et de la pollution des eaux au Pays Basque.
En mai dernier, quatorze plages du Pays Basque recevaient pour la première fois le « label Pavillon Bleu » après y avoir postulé. Ce label répond à une série de critères environnementaux : qualité des eaux, points d’eau potable, tri sélectif, traitement des eaux usées… Biarritz vante depuis une eau de qualité où les surfeurs comme les baigneurs peuvent se rendre en toute sécurité ainsi que des plages et des ports propres. La quasi pour ne pas dire la totalité des plages biarrotes évoluent maintenant sous l’égide pavillon bleu, que ce soit la Milady, Marbella, la Côte des Basques, le Port Vieux, la Grande Plage ou encore le Miramar.
Un pavillon pas si bleu que ça…
Mais depuis plusieurs étés déjà, le littoral basque connaît un phénomène de pollution récurrent, ce qui oblige régulièrement les municipalités à fermer les plages quelques jours et ce, en pleine période estivale comme c’est souvent le cas de Biarritz. Si la pollution de l’eau n’est pas forcément visible à l’oeil nu (quoi que), elle fait bel et bien partie du décor.
Cette pollution survient généralement à la suite d’épisodes pluvieux importants, mais la forte affluence touristique y est aussi pour quelque chose.
Les associations environnementales locales dénoncent une mauvaise filtration des eaux usées par les stations d’épuration de la région. Les bassins de rétention des stations d’épuration de Biarritz et de Bidart ne sont visiblement pas assez conséquents pour faire face à l’affluence touristique que connaissent ces villes lors des saisons estivales. Pour rappel, Biarritz cet été est passée de 25 000 à presque 100 000 personnes. Les eaux usées qui ne peuvent pas être traitées se retrouvent directement dans l’océan. Et lorsque des contrôles bactériologiques révèlent la présence trop importante de ces eaux usées dans les eaux de baignade, cette dernière est interdite.
Une autre pollution, plus grave encore, provient des usines de traitement des micropolluants. Ces dernières rejettent des molécules issues de détergents pétrochimiques dans l’océan. Certaines associations se battent d’ailleurs pour qu’ils soient retirés du marché. Des tonnes de molécules se trouvant à l’origine dans certains produits ménagers sont déversées dans l’océan chaque année. Leurs conséquences sont néfastes pour les usagers de l’océan mais aussi pour la faune, la flore et les écosystèmes marins.
Le réchauffement climatique peut parfois avoir bon dos. Car si on a évité le pire (l’Ostréopsis ovata aurait été bien plus dangereuse), la réouverture des plages ne signifie pas non plus que tout soit rentré dans l’ordre.
>> Article par Ondine Wislez Pons / Marc-Antoine Guet