En mars 2011, la disparition de Sion Milosky, noyé lors d’une session à Mavericks, allait pousser son pote Kohl Christensen a réagir pour que ce genre d’accidents ne se reproduise plus. Dans la grange familiale, lui et le surfeur brésilien (installé sur le North Shore) Danilo Couto rassemblèrent une grosse dizaine de big wave surfeurs afin de commencer à dispenser des règles de sécurité élémentaires, mais aussi afin d’établir des programmes d’entraînements spécifiques. En 2012, l’événement s’institutionnalise et devient le Big Wave Safety Summit, organisé au resort de Turtle Bay, à deux pas des spots du North Shore. Premiers gestes de secours, réanimation, sauvetage en mer : une soixantaine de surfeurs répondent à l’appel pour deux journées de formation, la première en classe, la seconde en conditions réelles.
Cette année, le Big Wave Safety Summit résonne encore plus fort parmi les chargeurs présents après la disparition de Kirk Passmore mi-novembre.
La première journée fut de nouveau consacrée à l’enseignement théorique, avec deux intervenants de choix, le waterman Brian Keaulana et Pamela Foster, formatrice en réanimation cardio-pulmonaire. « Nous avons passé neuf heures en salle de classe et les kids n’ont pas bronché, captivés d’un bout à l’autre », déclarait stupéfait Kohl Christensen. Parmi les « kids » en question, le « grand » John John Florence et son frère Nathan. Certains big wave riders étaient également là autant pour évoquer et partager leur expérience que pour se perfectionner. C’était le cas de Jamie Sterling, Mark Healey et même le légendaire « Double D », Darrick Doerner.
Si les cours sont théoriques, des ateliers pratiques ont néanmoins permis de tester les réactions des surfeurs présents. Répartis en petits groupes, ils devaient faire face – sur le papier – à des scénarios catastrophes différents, sur des spots différents.
Le lendemain, les élèves furent testés lors d’exercices pratiques en conditions rélles. De fausses victimes devaient être secourues en jet-ski, selon différents cas de figure : inanimées ou conscientes, avec ou sans planche, etc. Comme l’intervention de Carlos Burle à Nazaré pour récupérer Maya Gabeira l’a rappelé, même les meilleurs peuvent se planter. “Écoutez, Carlos a réagi et aujourd’hui Maya respire encore”, a lancé le respecté Brian Keaulana, afin de bien rappeler qu’en situation d’urgence, il s’agira d’une autre paire de manches. Mais en échangeant entre prof et élèves autour de questions simples (« Faut-il enlever le leash ? Comment grimper un corps sur le sled ? »), c’est toute une routine qui se met en place dans l’esprit des surfeurs, afin d’automatiser les gestes.
Car après tout, les gestes de réanimation qu’a délivrés Burle sur Maya, c’est bien ici-même l’an passé qu’il les avait appris !
Pour Kohl Christensen, initiateur du Summit, le parallèle avec la haute-montagne est devenu évident après avoir suivi une formation de secours en cas d’avalanche. « Les deux points que j’ai retenus de cette formation sont : ne jamais sortir en hors-pistes sans un pote qui t’accompagne et faire en sorte que ce pote puisse te sauver la peau. Il en va de même pour le surf de gros sur des reefs au large. »
Le sentiment qui ressort de ces deux journées est la prise de conscience que les surfeurs à l’eau ne doivent plus former des égos individuels mais une équipe. Et ça c’est déjà une première victoire.