Encore un exemple que les surfeurs sont souvent les premiers sauveteurs. Car dimanche dernier, à Anglet, on n’est pas passé loin du drame.
Alors que les conditions étaient plus que solides, Gautier Garanx et Julien Molia sont sortis en jet pour faire un peu de tow-in afin de s’entraîner avant l’arrivée de la saison hivernale et des grosses vagues. Une session d’entraînement comme il est coutume d’en faire avant l’arrivée des très grosses houles d’hiver. Mais pendant qu’ils répétaient leurs gammes et leurs réflexes d’équipe, ils furent les témoins d’un accident à quelques mètres de là.
Un plaisancier en jet ski s’est en effet fait percuter par une vague de 3 mètres et plus aux alentours de 16h, et ce, alors que la houle cognait fort du côté de la Madrague. Heureusement pour lui, Julien Molia et Gautier Garanx ont eu les bons réflexes, lui permettant de regagner la rive, choqué, à bout de force mais en vie.
Joint dans la journée, voilà ce que nous a confié Gautier Garanx, surfeur de gros et prof de surf :
« On était plusieurs équipages à faire du tow pour s’entraîner pour cet hiver. Les vagues étaient cool, on était en train de surfer. C’est moi qui tenait la corde. J’étais sur le point de me faire lancer sur une vague. Et Julien d’un coup me dit de lâcher la corde. Il me dit qu’un jet venait de se faire croquer par une vague. Moi je pensais que c’était notre photographe aquatique qui s’était fait avoir. Julien part voir le mec. J’ai l’impression que ça a duré super longtemps. Un autre équipage qui me faisait la sécurité vient me voir et me demande si je veux être ramené au fond, ce qui m’a bien arrangé car j’étais dans la zone d’impact avec ma planche. Je lui ai dit oui avec plaisir. Une fois que Jeremy Banti m’a mis en sécurité au large, il m’a dit qu’il filait voir Julien pour voir s’il avait besoin d’aide. Il est parti mais je l’ai vite vu revenir pleine balle vers moi. Il me dit qu’ils ont besoin de moi car ils n’arrivaient pas à faire monter le gars sur le sled. Gaillard, il était à bout de force. Il fallait une 3e personne. On est arrivé au niveau de Julien, et là, je ne sais pas comment, mais je le vois qui arrive à faire monter le gars sur le jet. Le plaisancier était à poil, la vague l’avait retournée. On n’avait du coup aucune prise sur lui pour le sortir. C’était un plaisancier qui faisait du jet ski au large en mode promenade. Il était juste en boardshort / tee shirt… Il a dû voir nos jets et je pense qu’il a voulu se rapprocher pour venir voir. Quand il est arrivé je pense qu’un set a levé. Pas de chance pour lui il était déjà devant les vagues à ce moment-là. Julien l’a vu en prendre une en jet (voir ci-dessous) mais arrivé en bas de la vague il s’est fait avaler. Et là, sans entraînement, il a tout perdu, le jet, le gilet, le tee shirt…Il n’avait pas de vrai gilet du coup celui qu’il avait s’est barré. Le mec était à poil, sans gilet de secours dans des vagues de 3-4 mètres. Il était en perdition en pleine zone d’impact ».
« On a essayé de le sortir de l’eau mais c’était costaud et on était à la nage dans les mousses » a poursuivit Gautier. « Le gars était au bout de sa vie, j’ai vu dans son regard qu’il se laissait partir. On était ensuite à 5 mètres du bord mais on n’avait toujours pas pied et je n’arrivais pas à le sortir. Des gars de la plage se sont mis à l’eau et sont venus nous aider. On l’a mis en PLS et on a appelé les pompiers. Des MNS en civil étaient là, ils sont venus prendre la suite et lui porter secours. Il s’est fait prendre en charge ensuite par le SAMU. J’ai eu de ses nouvelles hier il va bien. C’est un gars d’ici en plus, la cinquantaine, mais le problème c’est que les gens ne se rendent pas comptent du danger. Parfois des gens rigolent de nous parce qu’on fait du tow-in dans des vagues de 3-4 mètres qu’on pourrait prendre à la rame mais en fait, on fait ces sessions-là pour s’entrainer pour les grosses conditions d’hiver. Tu ne peux pas débarquer sur des spots de gros sans cet entraînement là en fait. Pour nous, ces vagues sont marrantes à surfer mais en fait, pour un gars qui n’a pas d’entraînement ça peut être fatal. Le gars aurait pu y rester. Parfois, nous faisons exprès de se jeter du jet quand une série arrive pour apprendre à se faire récupérer et bouffer un peu. Mais quand tu n’as pas cet entraînement c’est différent. Il n’avait probablement jamais vu de vagues de cette taille de sa vie et il s’est retrouvé dans une pente de 4 mètres… Il était complètement paniqué. Dès le lendemain matin, on était en contact avec les MNS d’Anglet. On souhaite d’ailleurs organiser une journée avec des équipages de tow-in, les MNS et les pompiers. Une journée d’échange d’expériences et de formations sur comment récupérer des mecs dans ce genre de situation. C’est quelque chose qui ne s’improvise pas, Julien a super bien géré mais on est conscient aussi d’avoir eu du bol ».
Toute la scène a été enregistrée depuis un drone. Elle sera probablement décortiquée prochainement entre surfeurs, MNS et pompiers afin de travailler sur les bons comportements et réflexes à aborder. Car sans cet équipage de tow-in ce jour-là et les bons réflexes que connaissent les surfeurs de gros de façon générale, le malheureux se serait probablement noyé.
On ne le rappellera jamais assez mais si l’océan est un terrain de jeu incroyable, il est primordiale d’en maitriser les codes au risque d’y laisser sa vie. Les personnes que l’on voit s’élancer dans des vagues de cette taille suivent tous à l’année un programme d’entraînement adapté. Ce sont des athlètes et ce qu’ils font n’est pas à la portée de tous, surtout sans entraînement.
Et c’est bien ce message de prévention qu’il faut retenir de cet accident dimanche.