Avant de se pencher sur la vague de Nazaré au Portugal qui a déjà permis à Garrett McNamara et Benjamin Sanchis de surfer les plus grosses vagues du monde, il suffit de “balayer devant chez soi” pour comprendre l’origine d’un tel monstre marin. Le Gouf de Capbreton ne vous est sûrement pas un phénomène inconnu : cet impressionnant canyon où “on pourrait mettre deux fois le canyon du Colorado” rappelle WikiOcéan. Il débute à 300m au large des plages d’Hossegor et Capbreton et s’étend, droit vers l’ouest, sur 250 km, s’ouvrant peu à peu pour atteindre une largeur de 15 km à son extrémité, avant de disparaître à plus de 4000m dans la plaine abyssale. Cette particularité géologique oeuvre comme un accélérateur pour le swell, qui n’est pas freiné par le plateau continental et frappe de plein fouet les plages landaises.
Le spot de Praia do Norte à Nazaré jouit d’une situation étonnamment similaire, s’ouvrant sur un canyon sous-marin qui porte son nom, d’une profondeur et d’une longueur quasi-identique au Gouf. La différence brutale de profondeur entre la fin du canyon et le littoral provoque un phénomène de réfraction brutale de la houle, qui permet le minimum de déperdition d’énergie de la houle, et donc de sa taille et de sa puissance. En outre, et à la différence de notre littoral landais engoncé au fond du Golfe de Gascogne, l’ouverture aux houles est plus large à Nazaré, même si les plus conséquentes sont généralement orientées ouest / nord-ouest, reçues de plein fouet également en France.
À ces données s’ajoutent des spécificités du site de Nazaré, comme cette pointe impressionnante qui s’avance dans l’océan. Le Promontório do Sítio, haut de 110m, fut jadis un site de choix pour riposter face aux attaques de pirates. Aujourd’hui, les mercenaires ne s’attaquent plus qu’aux vagues, mais sont toujours capables de venir de très très loin, à l’image des Hawaïens Shane Dorian et Garrett McNamara, ou de notre français Benjamin Sanchis.
Car il existe bien un phénomène d’amplification des vagues à Nazaré, un wedge version XXL. Quand un fort courant nord-sud vient rencontrer la houle, il ajoute au rebond du swell sur la falaise, qui s’amplifie alors : deux vagues ne font plus qu’une en se rejoignant et prennent une forme pyramidale caractéristique d’un wedge. C’est ce que l’on nomme la réflexion, un des trois phénomènes de déformation de la houle avec la diffraction et la réfraction déjà évoquée. Le revers de la médaille de ce wedge est aussi que le phénomène n’est pas régulier, au gré des rebonds sur la falaise : une vague de 3 mètres peut très bien être suivie d’une autre qui fera le double de sa taille, après avoir rejoint une autre vague !
Survolez le canyon de Nazaré en 3D :
Déjà publié le 30 janvier 2013.
D’accord avec ce qui a été dit et merci pour cet article instructif. Par contre (et tant mieux pour vous), je suis sûr que le fait de s’adresser à l’intelligence des gens est vendeur. Il ne faut pas croire que tout le monde se gave de tv-réalité et autres niaiseries.
en plus, c’est un rôle très important que vous jouez là: éclairer les surfeurs, leur permettre de mieux comprendre leur milieu…soyons persuadés que tout cela aura un impact positif pour nous tous.
Bien à vous
Complétement d’accord tim , un peu de science nous rend moins ignare !
Super article !
J’imagine que vous avez déjà énormément de taf mais plus d’article de ce style et même d’océano physique ça serait cool (dans la version numérique et papier même), mais c’est peut être moins vendeur…
En tout cas, super article et continuez votre super taf !!