Contrairement à ce que laisse croire l’emballement médiatique qui a suivi la session historique du lundi 28 janvier à Nazaré, Garrett McNamara n’était pas le seul héros du jour sur le spot de gros portugais. Outre ses deux partenaires, l’Hawaïen a partagé le line-up avec l’Espagnol Asier Muniain et les Marocains Jérôme Sahyoun et Othmane Choufani, 20 ans seulement.
Ce dernier, que l’on n’attendait pas vraiment sur cette session, nous raconte :
Comment t’es-tu retrouvé sur cette session ?
J’étais sur Agadir et je devais aller surfer Safi avec Jérôme (Sahyoun) dans les jours qui suivaient, avec Antoine et Edouard Delpero de passage au Maroc. On a reçu un texto d’Asier (Muniain), avec qui Jérôme fait souvent équipe en tow-in, annonçant un swell de malade à Nazaré, et une sérieuse carte à jouer pour le Billabong XXL. On comptait quand même rester au Maroc pour scorer à Safi. Puis Asier a envoyé un second texto disant qu’il n’avait pas de partenaires pour surfer Nazaré. Et là Jérôme a dit « c’est mon partenaire de tow, il faut y aller ». Le lendemain on prenait nos billets pour le Portugal.
Tu était suffisamment entraîné pour une session comme celle-ci ?
Personne n’est assez entraîné pour surfer des vagues de 20 mètres. Mais ça fait presque 2 ans qu’on surfe des vagues de 6, 7, 8 mètres en tow avec Jérôme, on a quelques spots pas mal pour ça au Maroc, et qu’on s’entraîne en piscine, ce genre de choses. On travaille aussi avec Samba, un Australien qui nous coache pour le surf de gros.
« Dès le samedi soir je n’arrivais plus à dormir, je ne pensais plus qu’à ça »
On ressent quoi avant une session comme celle-ci ? De l’appréhension ou de l’excitation ?
Pour moi de l’appréhension, clairement. Dès le samedi soir je n’arrivais plus à dormir, je ne pensais plus qu’à ça. Je prenais conscience de chaque geste banal en me disant que c’était peut-être la dernière fois que je le faisais (rires). J’ai aussi eu Nico Von Rupp avant la session, qui m’a dit que j’étais un grand malade d’aller surfer là-bas à cette taille, que ça allait être super dangereux… D’habitude les mecs essaient de te rassurer mais là non !
En arrivant le matin sur le spot, le spectacle était super impressionnant. Je n’avais jamais vu des vagues aussi grosses de ma vie. On a attendu l’après-midi pour s’y jeter. Mais il y a des jours où tu le sens, et d’autres où tu le sens moins. Ce jour-là on l’a senti et on y est allés.
« Niveau planche, on avait une Toy 5’9.A xi avait fait rajouter entre 4 et 5 kgs de plomb entre les 2 pieds pour l’alourdir »
Comment vous étiez-vous préparé niveau sécurité ?
Asier, Jérôme et moi avions deux gilets de sauvetage quand on surfait, un classique en dessous puis un autre gilet SLR Rescue, avec des poignées sur les épaules pour pouvoir être récupéré par le pilote du jet si on est inconscients. On avait aussi une bouteille d’oxygène sur le gilet, à portée de la bouche si on tournait la tête, avec une autre bouteille sur le jet pour les re-remplir si besoin. Enfin, il y avait Greg Rabejac (photographe, ndlr), Fred Behro (caméra) et notre entraîneur physique Ludovic Fournier sur la falaise et avec qui on communiquait par talkie-walkie. Ils pouvaient nous prévenir des sets qui rentraient pour éviter de “bouffer”. Ça nous a beaucoup aidé, parce que Nazaré reste un beachbreak, avec les pics qui décalent souvent.
Raconte-nous ta session ?
On est en réalité restés 3 jours à Nazaré : le lundi (le jour le plus gros, dont sont issues les images du clip, ndlr), le mardi et le mercredi. J’ai pris une petite dizaine de vagues en 3 jours. Ce n’est pas le genre de sessions où tu prends 20 vagues.
La vague déplace une quantité impressionnante d’eau, le drop est très, très long. Il faut penser à la trajectoire, mais aussi à sa respiration et à la gestion du clapot. Et la vague levait tellement qu’elle cachait par moment le soleil, ce qui assombrissait la face !
Niveau planche, on avait une Toy (conçue par le shaper landais Damestoy) 5’9 qu’on partageait avec Jérôme. Axi avait fait rajouter entre 4 et 5 kgs de plomb entre les 2 pieds pour l’alourdir.
On nous a reproché de surfer loin du point de déferlement, mais ce n’est clairement pas le genre de spots où tu tentes des carves ou tu prends des risques…
Comment s’est passée la « cohabitation » au line-up avec Garrett McNamara ?
Ça s’est super bien passé. On était en tout 5 surfeurs et 4 jet-skis. Le matin, il nous a prévenus que ça allait être vraiment fat, mais il est resté cool, il nous a conseillé sur le matériel à avoir pour être mieux préparé la prochaine fois. On ressentait un vrai esprit de famille. Niveau matos, il était d’ailleurs mieux équipé que nous, avec la combinaison gonflable Body Glove, un gilet de sauvetage classique et le gilet Patagonia, lui aussi gonflable. Et à l’eau, tout le monde surveillait tout le monde.
« Le surf de gros est une voie qui me plait plus que la compétition [—] Ce n’est que le début pour moi »
Tu penses quoi de la médiatisation de la vague de McNamara ?
On a trouvé ça hallucinant, et même abusé, parce que la vague dont les images ont fait le tour du monde n’a même pas cassé. La vague sur laquelle Jérôme tombe était en réalité plus grosse, il aurait eu une vraie carte à jouer pour le XXL si il n’était pas tombé.
La question qu’on se pose en regardant le clip c’est : est-ce que Jérôme repart en arrière après sa chute (à 1’52”) ?
Non, et c’est ça qui est hallucinant. Des experts nous ont affirmé qu’il était en réalité remonté au « point zéro » de la vague, le seul endroit où il n’y a pas d’énergie. A 50cm près il pouvait se faire happer et repartait en arrière, et là il aurait pris très cher. Le soir, personne n’a dit un mot quand on a vu les images…
Le gros surf est une chose vers laquelle tu as envie de te tourner de plus en plus ?
Complètement. C’est une voie qui me plait plus que la compétition. Jérôme est comme un grand frère, ça fait longtemps qu’on s’entraîne ensemble. Et on commence à avoir des connexions, des gars d’Hawaii qui nous ont invité à Jaws, l’envie d’aller à Mavericks. Ce n’est que le début pour moi. Avec aussi une grosse envie d’attaquer les grosses vagues à la rame.
Interview : Romain Ferrand
Je sais pas combien gagne le « best wipe out », mais je suis persuadé que même contre 100 000 euros, je pourrais tout simplement pas aller dans l’eau à cet endroit là! C’est même plus une question morale, mais juste une trouille panique qui me paralyserait sur le bateau!
superbes images, bravo. Par contre a 1 m prés ca netait pas le Best wip out of the year, mais plutot Mort Subie a mon avis.
Il est vraiment passé tres tres pret de la cata là
La trale de sahyoun.. Il ne serait pas tombé il aurait plus se qualifier pour les ride of the year, et s’il serait reparti en arrière ça aurai était pour best wipeout a coup sur.
magnifique! respect les jeunes!
Bravo Othmane fier de toi !!!