De la qualité de l’eau à la pollution plastique, en passant par le rôle du surfeur dans la préservation de son environnement, nous essayons de répondre aux problématiques liées à la pollution de l’océan. Dans ce quatrième épisode, nous verrons en quoi notre pratique du surf peut poser un problème environnemental dès lors que l’on questionne la composition du matériel, et comment y remédier au mieux.
On ne vous apprend rien, les océans sont pollués, l’air est quasiment intoxiqué, le tout par l’activité humaine. Et aller surfer à pied ou à vélo ne changera pas vraiment la donne (bon, faites le quand même, c’est mieux que de prendre la voiture pour faire 200m).
Si en surf on se sent si concerné par le sort de l’environnement, il reste certain que notre pratique n’est pas 100% naturelle. Car oui le surf pollue.
L’industrie textile est l’industrie la plus polluante sur terre. Émissions de gaz à effet de serre, transports tout autour du globe par bateaux voire par avions, rejet des matières usées dans l’environnement, sur-consommation donc sur-production (aussi appelée fast fashion)… le matériel-type du surfeur pollue.
Le problème des combinaisons
À moins de vivre sous le soleil à l’année et d’avoir l’occasion de surfer en maillot 365 jours par an, vous avez très probablement une combinaison (si ce n’est plusieurs) dans votre placard. Aussi utile soit-elle, elle pollue malheureusement énormément, de par sa production tout comme par sa destruction.
En effet, les combinaisons en néoprène sont composées du produit synthétique issu directement de dérivés pétrochimiques non recyclables. Leur fabrication demande un processus très particulier extrêmement polluant.
Tout d’abord, l’extraction du pétrole (par forage) et du calcaire (par mines), les deux matériaux nécessaires au néoprène, émettent d’importants gaz à effet de serre. Le processus de transformation des deux matériaux en matières premières (respectivement butadiène et acétylène) est très polluant, d’autant plus qu’il nécessite par la suite un troisième processus pour obtenir le polymère principal qu’est le néoprène. Au néoprène vient s’ajouter le polyester, produit à base de pétrole, pour les doublures externes comme internes, ainsi que de la colle à base de solvants.
Une fois usées, si elles sont jetées, les combinaisons sont soit enfouies soit incinérées étant donné qu’aucun point de récolte n’est (pour l’instant) mis en place. Et le néoprène n’est pas une matière réputée pour être recyclable.
Le problème des planches
La planche a un impact environnemental relativement important. L’impact carbone d’une planche 6’0 de 2kg est de 270kg (en comparaison, un PC portable a un impact carbone de 320kg). Bien sûr, c’est bien le processus de fabrication et les produits utilisés qui posent problème.
S’ajoute à cela le fait qu’un surfeur souhaite parfois (si ce n’est la plupart du temps) avoir un quiver assez développé, multipliant son impact environnemental par le nombre de planches qu’il possède. Il en est de même lorsqu’un surfeur renouvelle sa planche.
Les produits utilisés pour fabriquer une planche (hors alternatives plus écologiques, bien entendu) sont majoritairement issus de la pétrochimie, ce qui explique le fort impact environnemental de la construction d’une planche de surf. De même, les constituants d’une planche sont permis grâce à des procédés dont la demande énergétique est très forte.
La base d’une planche en pain de mousse pollue énormément. Rien que le pain de mousse représente à peu près 26% de l’impact environnemental de la planche une fois terminée. De plus, la partie coupée du pain de mousse est souvent jetée et n’est pas réutilisée. La résine en polyester pollue plus qu’une résine époxy.
La première est essentiellement composée de styrènes avec des composés chimiques cancérigènes.
La seconde, possède peu de composants cancérigènes mais peut causer des réactions allergiques sur le long terme. En terme de fibre, la fibre de verre a un faible impact environnemental contrairement à la fibre carbone qui est énormément énergivore de par son processus de fabrication.
Tous les accessoires de surf sont-ils nocifs à l’environnement ?
Crème solaire, wax, même leash ou dérives peuvent être nuisibles à l’environnement océanique. Certains sont nuisibles de par leur utilisation. Les autres, de par leur production.
La crème solaire est un des plus gros polluants des accessoires cités. Chaque année, ce sont entre 4 000 et 6 000 tonnes de crèmes solaires qui sont déversées dans les océans. Si on ne connaît pas encore toutes les conséquences que ce déversement peut causer, on sait déjà que la quantité de crème solaire pollue l’environnement marin, notamment à proximité des coraux.
En effet, il a été reconnu que le paraben, le cinnamate, le benzophénone ainsi que des dérivés du camphre, tous contenus dans les crèmes solaires classiques, détruisent directement les coraux et leur environnement.
La wax quant à elle, émet de fines particules dans les océans qui se joignent à des milliers d’autres, impactant la biodiversité marine. Si certaines wax ne présentaient pas leur composition sur les emballages, il faut savoir qu’une wax classique est principalement composée de paraffine, issue directement de la pétrochimie puisque la paraffine n’est rien d’autre que du pétrole brut transformé par raffinage.
Leash et dérives, quant à eux, ne posent pas de problème dans l’eau (sauf quand ils sont perdus), mais leur production peut elle aussi s’avérer polluante.
Pour votre prochaine planche
Pour la planche, de nombreuses innovations ont vu le jour ces dernières années. On est passé de la planche en bois à la planche en liège, sans omettre la planche en laine, en mégots, en algue ou même en champignons (non, pas ceux auxquels vous pensez).
De nombreux shapers essayent ainsi de diversifier les matériaux de base pour tendre vers une fabrication plus éco-responsable. Tous sont facilement trouvable sur le net.
Pour votre combinaison
Côté combinaisons, vous reconnaîtrez les combinaisons respectueuses de l’environnement si ces dernières sont composées de caoutchouc naturel pour réduire le taux de néoprène, aussi appelé Yulex. De même, d’autres combinaisons ne comprennent pas de Yulex mais du limestone, à base de rochers calcaire et donc sans néoprène. Là aussi il est facile de trouver lesquelles sur Internet.
Cependant, l’entretien de la combinaison joue aussi un grand rôle dans sa durabilité. Une combinaison bien entretenue c’est une combinaison qui dure et qui n’a pas besoin d’être jetée pour en acheter une nouvelle. Dans une même logique, si votre combinaison est usée, cela ne veut pas dire que tout est perdue pour elle et elle peut être réparée, ou alors donnée.
Surfeurs Solidaires est une association bayonnaise créée en 2001 qui a pour vocation d’aider des populations locales de régions considérées comme pauvres ou en voie de développement, le tout par le surf.
Pour ce faire, Surfeurs Solidaires récupère tout matériel de surf fonctionnel, même ancien, ce qui lui permet d’envoyer une aide matérielle importante dans les pays où elle se rend. Ainsi, si votre combinaison ne vous va plus ou que votre planche usée est encore surfable, n’hésitez pas à checker les points de dépôts de matos.
Dans le même esprit, il existe aussi Paddle Paddle Charity Project. Basée entre Biarritz et Bali, cette association d’une vingtaine de personnes a pour but de récupérer votre matos usagé pour l’envoyer à des enfants en difficultés dans des régions reculées.
Pour vos accessoires
Concernant les accessoires, il y a quelques marques dont la ligne de développement est l’éco-conception (respectueuse de l’environnement ainsi que des conditions sociales de production).
Concernant votre leash, de nombreux leash sont dits éco-conçus, c’est-à-dire que leur impact carbone de production est bien plus faible qu’un leash normal. Certains sont produits à base de Yulex (qui émet 80% de CO2 de moins qu’un polymère habituel), d’autres, à base de plastiques recyclés. Vous pourrez même trouver des leash en nylon recyclé qui, s’ils viennent à se casser, peuvent être réparés : comme ça, pas de leash jeté !
Niveau wax, pourquoi faire venir des wax biodégradables de Californie ou d’ailleurs, alors même qu’il y en a deux en France ? Greenfix est basée dans le Pays Basque et est fabriquée uniquement à base de composants naturels. Dans une logique similaire, vous trouverez Sim Wax, basée dans les Landes, une wax fabriquée uniquement à base de cire d’abeille.
Il en est de même pour les crèmes solaires. Deux principales marques françaises sont reconnues pour leur respect de l’océan, à savoir EQ et les Laboratoires de Biarritz. La première marque propose des protections solaires minérales non éco-toxiques pour le corail et le milieu marin. La seconde propose elle aussi des protections solaires dont les actifs sont essentiellement d‘origine naturelle pour le respect du microcosme marin.
Enfin, pour ce qui est des dérives, certaines entreprises se sont mises à la production de dérives à base de bouchons de plastique recyclés. Ou comment être tout aussi performant qu’éco-friendly.
>> Retrouvez le 1e épisode : la qualité des zones de baignade. Ce que c’est, par qui, pourquoi, comment.
>> … le 2e : eaux polluées, quels risques pour la santé ?
Je viens d’acheter une combi sen no Sen en Yulex et pour l’instant après 2 session, je trouve que l’étanchéité accrue par rapport au neoprene garde mieux la chaleur. Côté souplesse c’est à améliorer mais quelques sessions de plus vont aider
Il y a un article qui est sorti sur les dérivés en bouchons recyclés, mais les prix et le choix limité est vraiment prohibitif
Dommage, il y a tellement à faire pour moins polluer en surfant, les grosses marques de l’industrie du surf devraient vraiment montrer l’exemple, ce qui n’est pas le cas malheureusement
C’est intéressant, particulièrement pour les combinaisons usées et autres matériaux en ce qui me concerne. Quels sont les entreprises/structures qui proposent des dérives en modèles basiques, pour le surfeur lambda, et en matériaux éco-friendly ? Merci.