Le sujet a fait du bruit dans le monde du surf en compétition. Après l’épreuve du Surf Ranch, Gabriel Medina s’était tourné vers ses réseaux sociaux pour exprimer son mécontentement et son envie de changement au regard des critères de jugement de la World Surf League. Il a été acclamé par d’autres membres du milieu et suivi peu de temps après par Italo Ferreira qui s’est lui aussi emparé de ses réseaux. Hier, le CEO Erik Logan s’est exprimé au nom de la World Surf League sur le site de l’entreprise dans une lettre ouverte adressée à la « communauté WSL« . Il y fait notamment état des menaces de mort reçues par Ethan Ewing de certains fans brésiliens et d’autres cas similaires de graves tentatives d’intimidation, mais aussi du système mis en place pour légiférer la notation.
Les points à retenir
Concrètement, on lit dans cette lettre différents éléments :
- une condamnation d’abord des agissements menaçants et intimidants de certains individus envers des membres de la WSL (surfeurs, juges, employés…)
- une négation de la nature injuste ou partiale du système de notation (comme cela était suggéré par Gabriel Medina)
- des points auraient été attribués à certains surfeurs lors du Surf Ranch pour la progression et la variété, comme demandé par le Brésilien dans son post
- les critères de jugement ont été communiqué comme c’est la procédure en amont de la compétition aux athlètes, sans commentaires de leur part
- les athlètes sont en mesure de questionner les juges sur la notation de leur vague, dans le cadre d’un processus de transparence mis en place il y a plusieurs années. Les surfeurs qui se sont exprimés sur les réseaux sociaux n’ont pas, selon la WSL, suivi cette procédure.
- l’expression de cette plainte sur les réseaux sociaux constituerai une violation de la politique de la ligue
- Erik Logan souligne que si la ligue est ouverte au débat, elle refuse en revanche de remettre en cause l’intégrité de ses juges
Ce qu’on sait pour sûr
Selon les règles établies sur le site de la WSL et consultables en ligne, le jugement s’effectue sur chaque compétition par un panel de 5 juges. Pour chaque vague, la meilleure et la moins bonne note sont supprimées avant qu’une moyenne ne soit effectuée sur les trois scores restants. Toujours selon la WSL, les juges analysent les éléments suivants : l’engagement et le degré de difficulté, l’innovation et la nature progressive des manœuvres, la combinaison de manœuvres majeures, la variété des manœuvres, la vitesse, la puissance et le flow.
Dans le règlement propre à la World Surf League, on trouve également un passage sur la politique de conduite, et plus particulièrement sur « l’atteinte à l’image du surf« . Ce dernier stipule que les personnes soumises à cette politique ne doivent en aucun cas « avoir un comportement susceptible de nuire à l’image du surf », laquelle est définie comme « tout acte, quel que soit le moment ou le lieu, qui donne une image négative du sport du surf ou de la WSL. » Les commentaires et publications sur les réseaux sociaux sont aussi inclus dans cette définition. L’atteinte à cette règle est passible d’une amende monétaire allant de 1000 dollars à 50 000 dollars, et d’une suspension ou d’une expulsion possible. Si les posts de Gabriel Medina et Italo Ferreira ne portent pas atteinte à l’image du surf, ils renvoient cependant une image ternie de la WSL, qui selon eux ne s’accordent pas avec les attentes des athlètes et des fans du sport. Est-ce là la violation de la politique mentionnée par Erik Logan ?
Un débat à mener
Si l’échange est ouvert, il semble cependant compliqué, les deux parties se renvoyant la balle en public et avançant chacune des éléments très opposés. Nul doute que le sujet ne s’arrêtera pas là, les surfeurs étant en attente de réponses de la part de leur ligue. Cette dernière semble aussi vouloir faire entendre ses points, à commencer par le respect de son règlement. Il est probable, et sûrement souhaitable, que la suite de ces échanges s’effectue en interne, pour une résolution plus fructueuse de cette conversation centrale sur l’évolution du surf en compétition.
La lettre ouverte d’Erik Logan
À la communauté de la WSL,
Je souhaite aborder la conversation qui s’est déroulée au sein de notre communauté à la suite de la récente compétition du Championship Tour au Surf Ranch. Comme vous le savez probablement, un petit nombre d’athlètes ont fait des déclarations remettant en cause le jugement de la compétition et les résultats finaux.
Je souhaite répondre directement à ces déclarations, mais nous devons d’abord aborder une question beaucoup plus importante. Ces derniers jours, un certain nombre de surfeurs, de juges et d’employés de la WSL ont été victimes de harcèlement, d’intimidation et de menaces de violence, y compris de menaces de mort, en conséquence directe de ces déclarations. Ces choses ne devraient jamais se produire dans notre sport ou dans n’importe quel sport, et nous sommes dévastés que des membres de notre communauté en aient fait l’objet. C’est un rappel important pour nous tous que les mots ont des conséquences. Nous espérons que l’ensemble de la communauté de la WSL se joindra à nous pour rejeter toute forme de harcèlement et d’intimidation.
En ce qui concerne les déclarations faites, nous rejetons totalement l’idée selon laquelle le jugement de nos compétitions est de quelque manière que ce soit injuste ou partial. Ces affirmations ne sont étayées par aucune preuve.
Tout d’abord, les critères de jugement sont communiqués aux athlètes avant chaque compétition. Tous les athlètes participant au Surf Ranch Pro ont reçu ces documents le 20 mai. Chaque athlète a eu l’occasion de poser des questions sur les critères à ce moment-là. Aucun des athlètes qui ont fait ces déclarations n’a profité de cette opportunité lors du Surf Ranch Pro.
Deuxièmement, nos règles permettent à tout athlète de revoir la notation de n’importe quelle vague, avec les juges, et de recevoir une explication plus détaillée de la façon dont ils ont été notés. Ce processus est en place depuis un certain nombre d’années et est le résultat direct d’un travail avec les surfeurs pour apporter plus de transparence au processus de jugement. Il n’est pas acceptable, et c’est une violation de la politique de la ligue, que les surfeurs choisissent de ne pas s’engager dans la procédure appropriée et préfèrent exprimer leurs griefs sur les médias sociaux.
Un certain nombre d’athlètes au Surf Ranch Pro ont reçu des points pour des éléments tels que la progression et la variété, il est donc tout simplement incorrect de suggérer que ces éléments ne sont pas pris en compte dans les critères de jugement. En outre, nos règles ont été appliquées de manière cohérente tout au long de la saison, y compris lors d’événements remportés cette saison par des athlètes qui remettent aujourd’hui ces mêmes règles en question.
Le surf est un sport subjectif en constante évolution et nous accueillons favorablement un débat solide sur la progression de notre sport et les critères utilisés pour juger nos compétitions. Cependant, il est inacceptable qu’un athlète remette en question l’intégrité de nos juges qui, comme nos surfeurs, sont des professionnels d’élite.
Aucune personne ou groupe de personnes n’est au-dessus de l’intégrité du sport.
Cordialement,
Erik Logan
Directeur général de la WSL