Filipe Toledo, en route vers les sommets ?

Un début de saison en fanfare et, tout de suite, la machine médiatique s’emballe. Après sa première victoire en carrière dans les vagues faiblardes de la Gold Coast, on a ainsi eu vite fait de projeter Filipe Toledo vers un titre mondial. Mais voilà que le jeune insolent récidive à domicile devant une foule en délire lors du Rio Pro. Placé aux avant-postes du classement général, ses ambitions de titre mondial dépendent de ses résultats sur des épreuves qui lui conviennent moins bien…

Imbattable dans les petites vagues

On le sait, le surf du natif d’Ubatuba s’exprime à merveille dans les petites vagues. Son gabarit léger (1,75 m pour 64 kg), sa vivacité sur la planche, son pop naturel lui permettent de filer à travers les sections, si molles soient-elles. Capable d’envoyer des rotations en profitant du moindre bout de rampe, Filipe possède en plus un taux de réussite exceptionnel dans ces manoeuvres aériennes. Des capacités que le monde avait vite découvert quand, lors de l’édition 2013 du Rio Pro, le surfeur avait scoré le premier 10 parfait de sa carrière en posant sur la même vague un alley-oop suivi d’un air reverse. C’était l’année de sa qualification sur le circuit WT, lui qui avait obtenu son billet chez les grands grâce notamment à une victoire à Lacanau l’été précédent. Une saison inaugurale conclue au 15e rang mondial avec comme meilleure perf’ une demi-finale en France.

Depuis, le surfeur brésilien a bien évolué. Déjà, on l’a vu évoluer physiquement. Moins fluet, son surf sur le rail, s’il a toujours été précis et incisif, a pris du poids. Et surtout, Filipe gagne. Vainqueur l’an passé de l‘US Open à Huntington Beach puis du contest de Maresias, deux QS Prime, il s’est imposé cette saison à Snapper et Trestles (QS 10 000), laissant l’impression qu’il était injouable dans les vagues de petites tailles. C’est justement le genre de vagues que Toledo a trouvé à Barra da Tijuca pour le Oi Rio Pro. La victoire lui était presque acquise mais encore fallait-il mettre la manière. Deux dix parfaits scorés sur la route, pas le moindre tremblement et un statut de favori assumé pleinement. Contrairement à un Gabriel Medina qui subit peut-être la pression populaire conséquente à son titre mondial et à un début de saison moyen, Filipe semble évoluer sur son nuage, sans rien laisser l’atteindre. Surveillé de près par son père Ricardo, un ancien surfeur pro de années 80, qui le coache et drive au sifflet pendant ses séries, couvé par Dieu à qui il rend systématiquement hommage et admiré par de plus en plus de fans (un demi million de followers sur les réseaux sociaux, très actif sur Instagram), sa montée en puissance pourrait faire penser à celle de son compatriote Medina l’an dernier.

Perfectible quand ça creuse

Seulement, il manque une chose à Filipe Toledo pour envisager plus sérieusement un titre mondial, briller dans les vagues tubulaires. Car les gauches creuses du Pacifique (Cloudbreak, Teahupoo, Pipeline) ne se laissent pas facilement apprivoiser. S’il a bien atteint les quarts de finale à Pipe l’hiver dernier, le reste de ses performances sur ces spots virils n’est pas à la hauteur : beaucoup de 25e places et peu d’expérience emmagasinée. On attend également de le voir plus à son aise sur un spot comme Jeffreys Bay où les trajectoires priment. Des doutes sur ses capacités à engager qui rappellent ceux à l’encontre de Medina, jusqu’à ce que celui-ci remporte de beaux succès à Cloudbreak et Tahiti. Techniquement, pas de raison que le plus jeune surfeur du Tour ne soit pas au niveau. Alors, il pourrait bien faire plus que de seulement “penser” à un premier titre mondial…